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Nos préconceptions et préjugés nous font croire qu’un enfant à haut potentiel excellera à l’école et s’y épanouira pleinement.  Cela certainement car nous associons la réussite à l’école principalement aux compétences intellectuelles, à « l’intelligence ».  Or les compétences logiques, de raisonnement, de compréhension ne représentent qu’une infime partie des compétences en jeu à l’école  !  Les habilités sociales (compétences relationnelles), la capacité à réguler et gérer ses émotions, la capacité à se contrôler et maitriser ses comportements, la motivation, le désir d’apprendre sont clefs pour trouver sa place au sein du groupe-classe et investir sereinement et positivement l’école !

Certains élèves à haut potentiel sont en réelle souffrance à l’école et ont beaucoup de mal à s’adapter au cadre scolaire et à répondre aux exigences académiques.  Aussi, la scolarité de l’enfant intellectuellement précoce peut tout à fait être vécue de façon normale ou bien devenir pour un véritable cauchemar.

 

Nous accompagnons régulièrement chez Psyadom des élèves suite à différentes préoccupations et observations du corps enseignant : l’enfant est inattentif en classe, dans ses pensées, distrait, il a des difficultés relationnelles avec ses camarades, ne s’intègre pas, il « a du potentiel » et pourtant ses résultats sont faibles …   Nombre d’élèves à haut potentiel présentent ces difficultés.   Ces fragilités peuvent être interprétées à tort comme un déficit d’attention, un manque de bonne volonté …

Or l’enfant intellectuellement précoce peut se retrouver en difficultés à l’école pour plusieurs raisons :

  • Tout d’abord, à cause de l’ennui : les enfants précoces réfléchissent rapidement et font spontanément de nombreux liens entre les connaissances nouvelles et antérieures. Cela leur permet souvent de mémoriser et de comprendre beaucoup plus vite que leurs camarades.  Ainsi, nombre d’enfants précoces trouvent que le rythme des apprentissages à l’école n’est pas assez rapide.  Ils s’ennuient.   C’est pourquoi ils se dispersent, s’agitent ou au contraire se réfugient et se perdent dans leurs pensées.  Imaginez-vous, adulte, assister à un cours de CP.  Vous risquez rapidement de vous ennuyer, de vous sentir frustrés par le rythme inadapté (trop lent) d’apprentissage.  Rapidement, vous allez « décrocher », regarder par la fenêtre, tenter de vous occuper en explorant vos affaires, votre sac, votre trousse ; vous serez tentés de bavarder avec votre voisin ; ou de dessiner ; ou de vous évader dans vos pensées.

 

Les adultes confondent parfois ces comportements avec un manque d’attention (faisant évoquer à tort un trouble déficit de l’attention avec hyperactivité).  D’autres attribuent ces comportements à un manque d’éducation, à de l’insolence, à de la nonchalance.    L’élève est puni, parfois même, un redoublement, une exclusion, une ré-orientation scolaire est envisagée car l’élève est jugé insuffisamment mature, il n’investit pas assez son « métier d’élève » pour passer dans la classe supérieure.

  • Deuxièmement, un manque d’efforts par rapport aux apprentissages : souvent, l’enfant intellectuellement précoce n’a pas eu besoin de faire beaucoup d’efforts pour apprendre à lire, à compter ou bien pour comprendre l’addition et la soustraction. Il apprend ces notions implicitement, sans avoir à s’étayer sur les explications de l’enseignant et sans avoir à fournir d’efforts. Arrivé à un certain niveau scolaire, un très bon potentiel intellectuel ne suffit plus pour assimiler les connaissances. Des efforts d’organisation des idées (planification, synthèse, hiérarchisation) et de résolution de problème sont nécessaires.  Le courage et l’auto-discipline deviennent également essentiels face à une charge de travail accrue qui ne peut être assimilée implicitement et rapidement. La plupart des élèves assimilent ces méthodes et cette discipline lors de la primaire, grâce au travail et à l’écoute attentive des explications des enseignants.  Mais celui qui apprend « comme par magie », sans avoir à écouter l’enseignant, sans avoir à réfléchir aux étapes à respecter pour trouver un résultat n’assimilera pas ce savoir-faire.   Son bagage de stratégies d’apprentissage et de méthodologie est faible, il n’a pas les manuels pour répondre aux exigences du collège ou du lycée.  Car c’est face à la difficulté et dans l’effort que l’on développe de nouvelles stratégies de travail.  L’apprentissage implicite, « comme par magie » ne permet pas d’enrichir ses méthodes de travail.  L’élève à haut potentiel peut alors se retrouver perdu lorsque le rythme scolaire devient plus chargé et que les notions abordées demandent plus de travail et de techniques pour être assimilées.

 

  • Le besoin de méthodologie : Ainsi, ces jeunes à haut potentiel nécessitent un enseignement explicite des méthodologies de travail. Il est pertinent, à notre avis, d’associer cela à un travail métacognitif : l’amener à prendre conscience de son fonctionnement cognitif et de ses particularités.  Cela peut être soutenu par quelques bribes de neuro-éducation : lui transmettre quelques connaissances neuroscientifiques issues des travaux de recherche sur le haut potentiel.  Lui demander de faire des liens entre ces connaissances théoriques et les difficultés qu’il rencontre au quotidien.  A partir de là, lui demander de lister les difficultés qu’il rencontre et avec lui essayer d’élaborer des stratégies de travail pertinentes.  Ces élèves sont curieux, en recherche de sens !  Par expérience, ils sont tout à fait friands et sensibles à cette approche neuro-éducative.   Ce travail métacognitif va leur permettre de mobiliser correctement leurs savoir-faire et de les mettre au service des apprentissages scolaires.

 

  • La dyssynchronie : beaucoup d’enfants intellectuellement précoces ont un développement hétérogène. On parle alors de profil « complexe ».  Leurs compétences langagières, d’abstraction, de raisonnement sont bien souvent supérieures à la moyenne des enfants de leur âge alors qu’ils peuvent être en difficultés dans d’autres domaines.  Il s’agit notamment de l’écriture qui est souvent irrégulière, parfois peu lisible.  Certains ont du mal à investir l’écrit, se plaignent d’écrire trop lentement (d’autant qu’ils pensent très vite ! Le stylo ne suit pas le rythme de la pensée !).

 

De par leur grande sensiblité, ils sont parfois en proie à de grandes angoisses et à une grande susceptibilité et cherchent la réassurance de l’adulte. Ils peuvent paraître immatures affectivement.    L’écart entre leur niveau de raisonnement et leur développement affectif peut induire de la souffrance chez ces élèves.   Leur grande sensiblité, leur intolérance face à l’injustice, leur susceptibilité et leurs centres d’intérêts souvent éloignés de ceux de leurs camarades peuvent les mettre en difficultés socialement.  Ils ont parfois du mal à trouver des camarades qui leur ressemblent, des copains avec qui partager leurs centres d’intérêts.  Ils réagissent parfois excessivement en raison de leur grande sensibilité.  Tout cela les tient à l’écart, ils se plaignent souvent de se sentir bien seuls.  Dans les cas les plus graves, cela peut donner lieu à de véritable refus scolaires anxieux (phobie scolaire).  Prenant peu de plaisir dans les apprentissages enseignés à l’école et se sentant exclus par leurs camarades, ils développent peu à peu des stratégies d’évitement visant à les tenir à distance de l’école et à les protéger de ce vécu douloureux.

En conclusion :

A l’école, les capacités des enfants à haut potentiel peuvent se voir détériorées au fil du temps si l’environnement ne leur permet pas d’avancer à leur vitesse ou ne respecte pas leur mode de fonctionnement. Cela engendrera ennui, inattention, désinvestissement scolaire …. Certains ne se concentreront que sur ce qu’ils jugent suffisamment intéressant.  Leur entourage s’étonnera que l’élève a de bons résultats sur les tâches difficiles et complexes alors qu’il échoue lors de contrôles simples.  Son attitude peut donner l’impression que l’élève n’aime pas apprendre.  Bien au contraire ! Ces élèves sont avides de nouveautés et d’apprentissages mais ont parfois simplement besoin d’être plus stimulés !

Ainsi, certains élèves à haut potentiel présentent des difficultés à l’école.  Pas tous, bien au contraire ! Une grande partie s’en sort très bien ! Souvent, ceux-ci sautent des classes, leur permettant de ne pas s’ennuyer et surtout de se sentir stimulés et challengés à l’école.  D’autres sont en sport étude ou autre scolarité aménagée, leur permettant de s’épanouir dans d’autres domaines que ceux traditionnellement enseignés à l’école.

Mais d’autres enfants à haut potentiel nécessitent des systèmes éducatifs adaptés qui les aideront à exploiter leur potentiel, et surtout à s’épanouir et à prendre plaisir aux apprentissages.  Quelques classes pilotes se développent en ce sens à l’éducation nationale.

Il est donc important de souligner qu’un enfant à haut potentiel peut avoir des difficultés scolaires, qui n’enlèvent en rien à son extra-ordinaire potentiel !  Il est essentiel d’être attentif et sensibilisé au vécu parfois complexe de ces élèves, parfois source de grandes souffrances.

 

Article rédigé par Béatrice Navarro, neuropsychologue et par Camille Benoit, fondatrice de Psyadom.com.

Crédit image : Unsplash.

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